La fin des glaces à la vanille nous sauvera-t-elle du réchauffement climatique ?

Entretien de Caroline Champion avec Bruno du Boisguéheneuc, publié sur Droit de Cités / droitdecités.org en supplément au dossier « Ecologie/écologisme ».

Il constitue un prolongement de l’article « BIO-LOGIQUE, sur la logique de production et de consommation des produits « bio », publié dans ce dossier.


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Bruno du Boisguéheneuc est le fondateur de Sud Outre Mer, entreprise spécialisée dans l’exportation des produits d’épicerie fine des DOM-TOM, notamment la vanille.

Cet entretien a été réalisé le 3 juillet 2010 à Aurillac, à l’occasion des Européennes du Goût, festival gastronomique et culturel réunissant producteurs et professionnels des métiers de bouche.

Au cours de l’entretien, il évoque les paradoxes et conséquences implicites du discours écologique, bio, local, et durable, notamment au niveau de la route des épices, et de la circulation historique des produits d’Outre-Mer – à la base de toute la grande tradition de la pâtisserie française !

A écouter en cinq pistes sur la revue Droit de Cités / droitdecités.org :

– « Des cannelés sans rhum, de la glace sans vanille ! »  (1:54)
– La récupération des circuits du « bio » et du « commerce équitable » en supermarché (2:17)
– Les réponses du marché à la multiplication des exigences du consommateur (1:27)
– L’avenir des produits d’Outre-Mer face aux circuits du « Bio » européen, et autres labels d’origine (4:26)
– Pour une éducation du goût dans les programmes scolaires  (2:57)

Ce Bio qui donne la vie éternelle !

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Comme en témoignait récemment le salon Natexpo à Paris, le marché du bio est en plein essor, et résiste à la crise. Sans doute parce que sa consommation est basée sur un ensemble de mécanismes symboliques plus ou moins conscients, qui confère toute son efficacité au marketing agressif dont il est l’objet depuis quelques années…

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Le bio, une histoire de goût ?

.Pain bio Naturalia

Parpain bio Naturalia …

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Il faut se rendre à l’évidence, il y a plusieurs manière de manger bio.

Les motivations qui poussent des milliers de consommateurs à braver la barrière du prix des produits issus de l’agriculture biologique sont multiples, et correspondent à des systèmes de valeur très différents.

On peut tenter de les décrypter à grands traits…

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Pour une classification des motivations du Mangeur Bio, complémentaires ou exclusives :

(Attention, un argument peut en cacher un autre ...)

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– Le Mangeur Bio-Ecolo : Sensibilisé aux problèmes environnementaux, il consomme bio pour sauver la planète. Il achète avant tout des produits bio locaux, et porte une attention particulière aux questions de saisonnalité, d’emballage, etc.

C’est la version baba du bio…

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Le Mangeur c’est Bon – c’est Bio : Sensibilisé à une certaine exigence de goût, il se tourne vers le bio pour certains produits, au nom d’un certain souci de qualité. Dans sa recherche de produits « traditionnels », « artisanaux » ou « authentiques », il refuse les aliments standardisés et sans saveurs de l’industrie agro-alimentaire. Sa consommation n’est forcément pas exclusivement bio, le critère revendiqué étant gustatif et non éthique.

C’est souvent la version bobo du bio …

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– Le Mangeur Bio-Névro : Sensibilisé aux grandes crises alimentaires, et aux dérives liées à l’industrialisation des produits, il consomme bio pour se sauver lui-même, et apaiser ses angoisses de mort et de maladie (cancer, etc.). Son approche du produit bio est davantage guidée par des notions de vitamines et d’oligo-éléments que de par des critères de goût, de saisonnalité ou d’écologie.

C’est la cible du bio dans sa version la plus marketing…

A part peut-être dans son approche plus baba ( le mangeur type 1), le bio reste un problème de citadin, et  … de riche. Tant mieux, puisque c’est justement à eux qu’il s’adresse (par son discours, et par son prix).

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………. …. Antioxydants, oméga 3, ou 6, vitamines en toutes lettres (B, C, PP, E, CC…!) : ……………. ….. Le Bio est aussi une promesse (marketing) de vie éternelle….

superfruit

Jus de Grenade Bio.


Tenter de retrouver une certaine confiance quant à l’origine des produits, cette origine qui se dérobe dans les produits anonymes, standards, et uniformes de l’industrie agro-alimentaire.

Et en trame de fond, tenter de conjurer la mort par une alimentation rationnelle, régie en apparence par des principes scientifiques, – destinés à vaincre des angoisses irrationnelles …

Ici, honnêtement, il ne s’agit pas de consommer bio pour sauver le monde mais de payer le prix fort pour se sauver soi-même.

Quitte à avaler des produits étranges, voire carrément infâmes, consommés comme des médicaments…

L’argument santé du bio est souvent celui qui a le plus de poids marketing. Sous des apparences rationnelles, il joue sur des mécanismes affectifs et émotionnels extrêmement puissants.

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L’exemple des « superfruits »

bio

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Grenade, Goji, Acaï, Mangoustan, Noni, Mulberry, Noni, Yumberry … Autant de « superfruits » aux sonorités exotiques, qui arrivent des quatre coins du monde à la conquête du consommateur bio.

Des propriétés médicinales étonnantes : ces baies sont en général extrêmement riches en vitamines, anti-oxydants etc.

Des vertus gustatives qui restent toutefois à prouver ! Généralement présentés sous forme de jus, ces fruits sont parfois également proposés en gélule …

Acides, âpres, et souvent amer en fin de bouche … – « mais on s’y fait, et même, à force, on aime  » (sic) précise un représentant d’Elite Naturel à propos de ces jus.

A la première dégustation, difficile de ne pas grimacer en avalant cette version moderne de l’huile de foie de morue.

Et oui, la vie éternelle, ça se mérite !

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Lisons les étiquettes des produits laitiers

Savez-vous décoder les étiquettes des produits laitiers ?

Il existe sur tous les produits d’origine animale un code de traçabilité destinée aux services vétérinaires.

Grâce à un petit logo ovale, reproduisant ce code, il est possible de connaître avec certitude la provenance des produits.

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Etiquette

Exemple : une étiquette de fromage blanc Calin

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Les lettres indiquent le pays, les deux premiers chiffres sont ceux du département, les trois suivants ceux de la ville, les deux derniers identifient le lieu de production.

Ces codes sont secrets, uniquement accessibles aux services dédiés. Jusque là, le consommateur est donc assez peu concerné. Et peut continuer à regarder cette étiquette avec indifférence.

Sauf pour les produits laitiers.

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Pourquoi?

Parce que sans même connaître le code, il est possible d’établir des comparaisons entre les marques.

En effet, pour des articles comme les yaourts par exemple, il n’existe pas de différences majeures de qualité entre les marques et le discount des « marques de distributeur » (ou MDD, comme Auchan Carrefour ou Leader Price, qui commercialisent des produits qu’elles distribuent mais ne produisent pas elles-mêmes)

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C’est bien simple :

– La vache ne fait qu’une sorte de lait ; foin de mauvais morceaux, de restes ou de chutes comme avec la viande!

– Les produits laitiers sont des produits simples ; point de recettes spécifiques, et de sous-recettes, plus grasses, plus salées, plus sucrées, comme pour les plats cuisinés ! Développer des recettes pour distinguer marques / discount augmenterait trop les coûts. Pour faire des « économies d’échelle » (augmenter les volumes et baisser les coûts de production) les marques revendent donc une partie de leur production à d’autres entreprises, par le système des marques de distributeur. Sans rien changer au produit.

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Conclusion : Grâce à la simple comparaison des étiquettes vétérinaires, il est possible par exemple d’acheter du fromage blanc Calin sous la marque Leader Price.

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Faites-le test au rayon des yaourts !

Fromage Blanc Leader PriceFromage Blanc Calin

A gauche, fromage blanc Leader Price : ici, 1€75/kg.
A droite, fromage blanc Calin : ici, 2€90/kg.

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Attention : Ceci est valable uniquement sur les produits laitiers. Si ce logo ovale est inscrit sur tous les produits d’origine animale, la comparaison des jambons ou foie gras ne vous sera pas utile … les provenances pourront être identiques, les qualités ne seront jamais les mêmes … a priori !

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Compte Rendu d’Exploration : Six Soupes Picards

Mardi 3 novembre, il pleut à Paris…

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Automne – hiver : Saison des soupes

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Et le soir où l’on n’a pas envie de la faire soi-même … mais qu’on préfèrerait éviter de donner dans la brique ou le lyophilisé ?

Que penser des soupes surgelées Picard ? .

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Compte-rendu de dégustation / exploration de six soupes Picard

Mode opératoire : Chaque soupe a été dégustée par deux personnes, après trois minutes au micro-ondes (test en conditions réelles : a priori, rares sont ceux/celles qui font chauffer leurs soupes surgelées à feu doux…). Aucun assaisonnement supplémentaire n’a été ajouté. Afin d’éviter toute influence, la liste des ingrédients des soupes n’a été consultée qu’après dégustation.

Un superbe pain de campagne a été utilisé pour ‘vérifier’ les fonds de soupe qui le méritaient !

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–é,

Soupe 1 : Potage aux trois légumes verts : haricot vert, brocolis, épinard. (2€70/kg)

Bilan : Cette soupe est très bonne !

La texture est très veloutée, sans être crémeuse. Le goût dominant est clairement celui du haricot vert, avant l’arrivée en renfort du brocoli, en fin de bouche… La soupe est également relevée par une pointe d’oignon. Pas trop salée.

Remarque :  Mais où est passé l’épinard alors ? un peu à la trappe. (Je vérifie !). En y mettant du sien, on le devine, mais il faut avouer qu’il reste extrêmement timide. – C’est bien le seul qu’on puisse faire à cette soupe : à quoi bon créer un effet d’attente sur l’épinard, alors qu’il est quasi absent cette soupe (3%) ?

Ingrédients : Eau, haricots verts (25%), brocolis (2o%), crème fraîche (5%), épinards (3%), oignon, sel, lactose, protéines de lait.

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Soupe 2. Velouté de légumes du potager : carotte, navet, pomme de terre. (3€50/kg)

Bilan : Cette soupe est plutôt bonne, mais tellement sucrée…

La texture est plus liquide que la soupe précédente. L’attaque se fait sur une saveur sucrée de navet, avant le développement du goût de l’oignon. La carotte est surtout présente dans la couleur de la soupe, et en fin de bouche par une note légèrement terreuse. Sur certaines bouchées, le goût d’une herbe inidentifiable surgit (après examen de la composition, je crois que c’était le poireau) L’ensemble est suave, sucré, agréable mais assez rapidement écoeurant. Disons qu’on ne s’en resservirait pas un second bol.

Remarque : La pomme de terre, qu’on attendait pour épaissir l’ensemble, est assez neutre, et la soupe reste vraiment liquide (c’est la plus liquide des soupes testées ici).

Ingrédients : Eau, carottes (12%), courgettes, oignon, pommes de terre (5%), navet (5%), poireau, beurre (2%).

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Soupe 3. Velouté de cresson, pomme de terre, crème fraîche. (3€95/kg)

Bilan : Cette soupe a du caractère, et restitue vraiment celui du cresson.

La texture est veloutée, crémeuse, sans être écoeurante. Le goût du cresson est agréablement restitué ; son amertume est parfaitement maîtrisée par la compagnie de la crème et de la pomme de terre. Le persil joue par petites touches, sur certaines bouchées. L’ensemble conserve un côté brut, à peine assaisonné. (Qui se marie très bien avec l’acidité d’un bon pain de campagne…!)

Remarque : Pas trop salée ; à la limite, plutôt légèrement sucrée par la crème mais cette fois sans excès. Equilibre impeccable entre sel, sucre, amertume et acidité de la soupe (apportée par le poivre – ou plutôt par l’arôme naturel de poivre, qui me laisse perplexe : pourquoi ne pas utiliser du bon vieux poivre plutôt que d’en extraire l’arôme? Peut être pour mieux en maîtriser le dosage… )

Ingrédients : Eau, cresson (26%), pommes de terre (16%), crème fraîche (14,9%), persil, sel, amidon de riz, arôme naturel de poivre.

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Soupe 4. Velouté fève, épinard, cuisinée à l’huile d’olive. (2€90, vendu en sac de 600g)

Bilan : Cette soupe est écoeurante.

La saveur des légumes est couverte par un goût d’huile d’olive industrielle rance, type Puget de grosse cavalerie. Les fèves arrivent à se faire un peu remarquer, les épinards restent sur la réserve. Quant à la texture, elle se rapproche de celle du mouliné de légumes, et conserve de la mâche. Mais elle possède aussi un côté visqueux, assez désagréable.

Remarque : Cette soupe est trop salée, trop marquée sur l’huile, sans aucune finesse de l’ensemble. Tout cela est très écoeurant. (Je ne la sauce même pas, elle gâche le pain!)

Ingrédients : Eau, fèves (12%), pommes de terre (12%), huile d’olive vierge extra (5%), feuilles d’épinard coupées (4,5%), feuilles de blette coupées, pois chiches, extrait de levure, ail, sel, sauce piquante (piment, hile d’olive, sel, ail).

Soupe 5. Potage au champignon, pomme de terre, crème fraîche. (3€65/kg)

Bilan : Cette soupe est une vraie gourmandise !

Le petit goût de sous-bois du champignon est bien là, dans mon bol, et se développe gentiment en bouche. Au même moment, une saveur de caramel au beurre salé surgit, et ne vous quitte plus. Incroyable.  L’ensemble est assez liquide, et légèrement sucré.

Remarque : Le côté beurre noisette de cette soupe se marie très bien avec les saveurs du champignon!

Ingrédients : Champignon de Paris (43,8%), eau, pomme de terre, oignon, crème fraîche, carotte, céleri rave, beurre, sel, ail.

Soupe 6. Velouté d’asperge verte, pomme de terre, crème fraîche (4€95/kg)

Bilan : Cette soupe joue bien le jeu de l’asperge.

On retrouve vraiment le goût de l’asperge verte, avec son côté terreux, si caractéristique. La texture est bien veloutée et crémeuse (sans être lourde ou écoeurante).

Remarque : L’assaisonnement est discret, mais bien dosé. Ce qui faut de sel et de poivre à mon goût.

Ingrédients : Eau, asperges vertes (29%), pommes de terre précuites (11%), lait écrémé en poudre, crème fraîche (3%), beurre, sel, poivre blanc.

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Bilan général de l’exploration : Que penser des soupes surgelées Picard ?

Sur les six soupes dégustées, quatre sont vraiment réussies, et mériteraient qu’on s’en resserve un second bol… Les deux autres (soupe 2 et 4) sont plus écoeurantes : la soupe carotte navet (2) est plutôt agréable mais trop sucrée ; le palais en est vite saturé. Quant à la soupe fève épinards à l’huile d’olive (4), elle est décidément sans finesse, trop salée, lourde, au point qu’on a du mal à finir son assiette !

Elle est en réel décalage avec le reste des produits testés : de façon générale en effet, les soupes Picard restituent bien le goût du légume, avec un côté brut, légèrement assaisonné.

Côté ingrédients, ils sont plutôt rassurants, simples et naturels. Un peu d’amidon de riz, et des protéines de lait se baladent dans certaines soupes ; et puis ce mystérieux arôme naturel de poivre qui vient mettre son grain dans la soupe de cresson…

Côté prix, selon les ingrédients, ils vont du simple au double. Les sacs étant souvent conditionnés par kilo, ils restent plus attractifs que ceux des soupes en briques, etc.

Ma préférée ? La soupe aux légumes verts ! Et celle de ma mère !

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Vous les avez goûtées ? Vous connaissez d’autres bons (ou mauvais) plans soupes ?

N’hésitez pas à laisser un commentaire !

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Compte-rendu à mettre en perspective avec l’article Warhol, c’est de la soupe!

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